Blog / COP ou pas COP ?
Chaque année, depuis 1995, se tient la Conférence des Parties sur les Changements Climatiques, plus connue sous le nom de COP. Elle réunit l’ensemble des 196 pays signataires de la Convention-Cadre des Nations Unies sur les Changements Climatiques, fruit du travail réalisé par le Sommet de la Terre de Rio, en 1992.
« L’objectif ultime de la Convention […] est de stabiliser […] les concentrations de gaz à effet de serre dans l’atmosphère à un niveau qui empêche toute perturbation anthropique dangereuse du système climatique. Il conviendra d’atteindre ce niveau dans un délai suffisant pour que les écosystèmes puissent s’adapter naturellement aux changements climatiques, que la production alimentaire ne soit pas menacée et que le développement économique puisse se poursuivre d’une manière durable. »1
Pour ce faire, les États signataires s’engagent à la tenue d’une réunion annuelle rassemblant différents secteurs de la société (négociateurs et représentants de chaque pays, organisations de la société civile, entreprises) afin, non seulement, de ratifier des accords concrets afin de tenir leurs engagements, mais également d’évaluer l’application effective de ces mesures et les progrès réalisés.
Bien qu’il y ait une COP chaque année, certaines ont davantage marqué les esprits que d’autres, du fait de la signature d’accords historiques qui les ont conclues. Le Protocole de Kyoto est ainsi né de la COP 3, réalisée à Kyoto, au Japon, en 1997. Il invite les différents États à réduire leurs émissions de gaz à effet de serre de 5% en moyenne par rapport à leurs émissions de 1990, et ce, sur une période allant de 2008 à 2012. La COP 18, qui s’est tenue à Doha (Qatar) en 2012, a permis le prolongement du Protocole de Kyoto jusqu’en 2020, avec, cette fois, une réduction de 18% en moyenne des émissions de gaz à effet de serre par rapport à 1990. En 2015, s’est tenue à Paris la COP 21, qui a donné naissance à l’Accord de Paris. Celui-ci entend, notamment, « [contenir] l’élévation de la température moyenne de la planète nettement en dessous de 2°C par rapport aux niveaux préindustriels et [poursuivre] l’action menée pour limiter l’élévation de la température à 1,5 °C par rapport aux niveaux préindustriels ».2 L’Accord de Paris est considéré comme historique, car il s’agit du premier texte sur le climat rédigé par l’ensemble des pays de la planète et massivement signé (195 pays).
Pourtant, le retrait des États-Unis de l’Accord de Paris, annoncé par le Président américain Donald Trump en juin 2017 et officialisé début novembre 2019, a semé le doute sur l’avenir réel de ce « monde plus sûr pour nos enfants » évoqué par Barack Obama en réaction immédiate à la signature de l’Accord. En outre, l’Accord de Paris n’est pas contraignant, c’est-à-dire qu’aucune sanction n’est prévue en cas de non-respect par les États signataires. Il invite uniquement chaque pays à publier ses objectifs de réduction et fait ainsi le pari de la transparence sur celui de la contrainte. À ce jour, 165 pays des 194 signataires ont envoyé leur contribution.3 Même si tous tenaient leurs objectifs, l’augmentation de la température serait encore de 3 °C, soit le double de ce que prévoit l’Accord.
D’où l’importance que relève la COP 25 de cette année : il s’agit de redonner son souffle à la lutte contre le réchauffement, d’encourager les États et chacun des secteurs de la société à s’engager sans réserve dans la réduction des gaz à effets de serre et contrebalancer ainsi le retrait américain.
Pourtant, son organisation se révèle être une vraie gageure. En effet, alors qu’il était initialement prévu qu’elle se tienne en novembre, au Brésil, le Président Jair Bolsonaro, climatosceptique reconnu, a brusquement fait volte-face en indiquant qu’il renonçait à l’accueillir, laissant même planer l’idée qu’il pourrait faire sortir son pays de l’Accord de Paris. Le Chili a alors été choisi pour accueillir la COP 25, permettant ainsi de maintenir la Conférence en Amérique latine, chaque région du monde assumant tour à tour son organisation. C’était sans compter le mouvement de contestation qui y sévit depuis octobre, déclenché par la hausse des tarifs des transports publics et qui a fait plus de vingt morts. Bien que le Président chilien, Sebastián Piñera, ait annoncé le retrait de la mesure d’augmentation, les manifestations continuent : les Chiliens dénoncent notamment les inégalités sociales et réclament désormais la modification de la Constitution (héritée du régime militaire de Augusto Pinochet), ainsi que la démission de Piñera.
C’est dans ce contexte que le Président chilien a annoncé, le 30 octobre, qu’il n’accueillerait plus la COP 25, qui devait se dérouler du 2 au 13 décembre, à Santiago. Placé une nouvelle fois au pied du mur, le Bureau de la COP se voyait donc dans l’obligation de décider s’il reportait ou annulait la Convention. C’est l’Espagne, par l’intermédiaire de son Président du gouvernement, Pedro Sánchez, qui l’a tiré de ce mauvais pas, en proposant d’abriter la réunion. La COP 25 aura donc bien lieu, et aux dates prévues, mais de l’autre côté de l’Atlantique, à Madrid.
Si l’Espagne est l’hôte de l’événement, le Chili en conserve cependant la présidence, et souhaite faire de cette COP une « COP bleue » en mettant l’accent sur l’importance des océans dans la lutte contre le changement climatique. Rendez-vous, donc, à Madrid, dans les installations de l’IFEMA (Feria de Madrid), du 2 au 13 décembre 2019, à moins d’un nouveau rebondissement.
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Art.2, Objectif, Convention-cadre des Nations Unies sur les Changements Climatiques, Nations Unies, 1992 ↩
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Art. 2, a), Accord de Paris, Nations Unies, 2015 ↩
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Les 165 objectifs disponibles à ce jour peuvent être consultés sur le site de l’ONU ↩
Yasmina est géographe. Ses voyages ont commencé alors qu’elle était toute petite, à travers les livres, et ils se sont ensuite poursuivis grâce à la découverte de la géographie en classe, puis sac au dos.